Un argument souvent mis en avant par les organisateurs de grands rassemblements sportifs comme les jeux olympiques, notamment pour justifier leur coût important, est de mettre en avant le fait que cela va motiver la population générale à la pratique sportive.
L’organisation des jeux olympiques procure au pays organisateur généralement une émulation dans une grande partie de la population. Elle permet généralement dans le pays hôte de débloquer des fonds conséquents pour la recherche et l’accompagnement de la performance de élites sportives. Elle apporte également de nouveaux équipements sportifs sur les sites dans les villes hôtes.
Les jeux sont-ils pour autant un levier de motivation à l’activité physique et sportive d’une population sédentaire ?
Dans une revue systématique de 2022 Lion et Al. (1) ont analysé l’influence de trois facteurs sur la pratique physique d’une population : l’organisation de rassemblement sportif internationaux (Jeux olympiques, championnats du monde), les succès et médailles glanés par le pays lors de ces rassemblements et l’influence de l’identification à un sportif professionnel.
Dans cette étude, les auteurs rapportent que l’organisation d’un grand rassemblement sportif n’a pas d’influence ou une influence mitigée sur l’activité physique et sportive de la population générale que ce soit à court ou long terme. C’est ce que montrent les études réalisées après les jeux de Sydney en 2000, de Pékin en 2008, de Vancouver en 2010 et Londres en 2012.
Certaines études ont montré une nette augmentation de pratiquants d’au moins une activité sportive après les jeux de Londres de 2012. Mais si l’on rapporte cette augmentation à l’augmentation de la population générale, les chiffres sont moins éloquents. En effet le pourcentage de la population britannique qui pratique au moins une heure de sport par semaine était de 36.6% en 2007/2008, 36.9% en 2011/2012, et 36.1% en 2015–2016.
Les auteurs émettent l’hypothèse que si toute la communication et la promotion autour des jeux concerne presque exclusivement le sport professionnel et le sport/performance et que d’autre part les nouvelles installations sportives sont difficilement accessibles à la population, ces grands rassemblements sportifs internationaux auront peu d’impact sur l’activité physique des populations.
Le fait que des sportifs du pays hôte gagnent des médailles, dans cette même étude, ne semble pas avoir d’effet non plus ou un effet mitigé sur la pratique sportif de la population générale. Cet effet est probablement très différent d’une population à l’autre en fonction du niveau d’activité physique général de la population et du niveau d’éducation par rapport à la pratique sportive.
Avoir comme modèle une star internationale dans le pays, n’a pas non plus d’effet sur la pratique sportive générale selon les auteurs de cette revue systématique. Par contre des conduites déviantes dans le sport professionnel comme le dopage, la tricherie organisée aura un effet négatif sur la promotion de l’activité physique.
Les études montrent donc un faible impact, voire une absence d’impact de grands rassemblements sportifs sur le niveau d’activité des populations.
On remarque cependant souvent une nette augmentation des inscriptions dans un sport précis après les jeux olympiques suite à la moisson de médailles et au charisme de certains olympiens. Ce que ces chiffres ne disent pas c’est qui sont ces néo-inscrits. Viennent-ils d’un autre sport ? Ajoutent-ils cette nouvelle pratique à d’autres sports ? Ou sont-ils des sédentaires ?
Par ailleurs il est intéressant de se questionner sur la pérennité de cette pratique dans le temps.
Profiter de l’engouement avant, pendant et après les jeux
Les auteurs mettent en avant trois concepts nécessaires pour faire rimer événement sportif international avec augmentation de la pratique d’activité physique de la population.
1/ L’organisation de séances d’information, d’éducation à large échelle sur les bienfaits de l’activité physique avant et surtout pendant les jeux où l’on peut profiter d’un engouement sociétal massif et d’une ambiance « jeux ».
2/ L’organisation d’activités de masse pendant les jeux. Le marathon pour tous organisé pendant les JOParis 2024 est à ce titre exemplaire. Encore faut-il s’assurer qu’il n’a pas attiré que des coureurs mais aussi des sédentaires qui ont pu se préparer ces quatre dernières années lors du lancement de l’action.
3/ Une politique de promotion de l’activité physique tout au long de la préparation et du déroulement de ces rassemblements sportifs.
On l’a vu lors de l’organisation et pendant le déroulement des jeux de Paris ces trois concepts ont fleuri un peu partout dans l’hexagone et bien au-delà. Gageons que les prochaines études viennent contre dire celle de Lion & al. (1).
A l’instar de ce qu’a fait la ville de Rotterdam en 2021 (2) toute organisation d’un grand rassemblement sportif devrait allouer un pourcentage de son budget (10% dans le cas présent) à la promotion de l’activité physique pour la population générale.
De plus le niveau d’équipements sportif et leur accessibilité au plus grand nombre doit être mis en avant. L’exemple espagnol est éclairant à ce sujet (3), le niveau général de l’activité physique et sportive a été plus marqué suite à la mise en place de structures sportive qu’après les jeux de Barcelone ou d’autre rassemblement sportifs internationaux.
L’accessibilité de ces structures à la population est la condition indispensable à leur fréquentation. Accessible dans l’espace (pas trop loin), dans le temps (larges plages d’ouvertures), accessible financièrement, inclusives, non exclusives à la performance.
Les chiffre de l'études de Lion (1)
1/ Effet de l'organisation d'un grand rassemblement sportif sur l'activité sportive de la population
Jeunes à court terme
Effets nuls : 3 études
Effets mixtes : 4 études
Effets positifs : 3 études
Jeunes à long terme
Effets nuls : 1 étude
Effets mixtes : 1 étude
Effets positifs : 1 étude
Adultes à court terme
Effets négatifs : 1 étude
Effets nuls : 6 études
Effets mixtes : 5 études
Effets positifs : 6 études
Adultes à long terme
Effets nuls : 3 études
Effets mixtes : 7 études
Effets positifs : 3 études
2/ Effet des succès sportifs du pays hôte d'un grand rassemblement sportif sur l'activité sportive de la population
Jeunes à court terme
Effets nuls : 4 études
Effets mixtes : 2 études
Jeunes à long terme
Effets nuls : 2 études
Effets mixtes : 3 études
Adultes à court terme
Effets nuls : 3 études
Effets positifs : 2 études
Adultes à court terme
Effets négatifs : 1 étude
Effets nuls : 3 études
Effets mixtes : 2 études
Effets positifs : 1 étude
3/ Effet des "role models"
Effet à court terme : 0/3 études
Effet à long terme : 0/3 études
Sources
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